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Quatrième étape : Inventaire (4/10)

La peur

Si nous pouvions observer la maladie de la dépendance dégagée de ses symptômes premiers, c’est à dire sans les caractéristiques les plus évidentes que sont l’usage de drogue ou tout autre comportement compulsif, nous trouverions un magma de peurs liées à l’égocentrisme. Nous avons peur d’être blessés ou peut-être d’éprouver des sentiments trop intenses, alors nous vivons une sorte de demi-vie, en prétendant vivre sans jamais vivre pleinement. Tout ce qui peut être source d’émotions nous effraie, alors nous nous renfermons et nous nous isolons. Nous redoutons de n’être aimés de personne, alors nous consommons pour nous sentir plus à l’aise en compagnie de nous-mêmes. Nous avons peur d’être démasqués et d’avoir à en payer le prix, alors nous mentons, trichons ou blessons les autres pour nous protéger. Nous avons peur d’être seuls, alors nous utilisons et exploitons les autres pour ne pas l’être, ou être rejetés ou abandonnés. Nous avons peur de manquer de tout, alors nous nous acharnons égoïstement à imposer notre volonté, sans tenir compte du tort que nous causons ainsi. Si, grâce au rétablissement, nous obtenons des choses qui nous tenaient à cœur, nous avons parfois peur de les perdre. Aussi, pour les conserver, nous mettons-nous à composer avec nos principes. Il faut dons extraire toutes les racines de la peur égocentrique, afin de lui ôter le pouvoir de nous détruire.

Extrait de l’ouvrage de Narcotiques Anonymes,
Guides de travail des étapes de Narcotiques Anonymes,
édition 2002, p. 45.
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De qui ou de quoi ai-je peur ? Pourquoi ?

Je dispose d’une nature anxieuse plutôt que peureuse. Je crois donc avoir eu peur en de rares situations. J’ai pu ou je peux cependant avoir peur de différentes personnes, de différentes choses, je retiens notamment :

  • Mon père : j’ai été terrorisé par sa violence, ses humiliations et sa maltraitance (au point de m’uriner dessus à plusieurs reprises) ;
  • Mes bastons d’enfant, d’adolescent : j’ai pu ressentir de la peur dans des conflits et des bagarres ;
  • Mes confrontations à l’autorité : j’ai pu être mort de peur lors de confrontations aux conséquences de mes actes (professeurs, employeurs, policiers, juges…) ;
  • Les conséquences de la consommation de drogues : j’ai été terrifié parfois lors de ma consommation de produits (bad trip), de descentes, de crises de manque ou de prise de conscience de l’emprise de ma dépendance ;
  • Mon impuissance : je peux maintenant redouter ne pas pouvoir faire face à mes responsabilités, à mon autonomie (accident, hospitalisation, incapacité(s), sénilité, vieillesse…).

Comment m’y suis-je pris pour cacher mes peurs ?

J’essaye de ne pas rester tétanisé par la situation mais plutôt de m’en sortir, de quelque manière que ce soit, de faire face, de lutter. Cela peut s’exprimer de mille manières comme par exemple : fuir, séduire, capituler, porter des coups, hurler, négocier, me rallier…

De quelle manière négative ou destructrice ai-je réagi à mes peurs ?

La peur est une émotion primitive. La réponse à cette émotion aura de grande chance de s’inscrire dans un registre d’actions de même nature (primitive) : l’immobilisme, l’agressivité ou la fuite. J’ai pu réagir à mes peurs de manière négative ou destructrice de différentes manières (notamment vis-à-vis de mon père durant mon enfance) comme par exemple :

  • Je mentais, je trichais : La peur de mon père m’a conduit à tous les excès. Je manipulais continuellement la réalité pour tenter de minimiser les réprimandes et les corrections. J’ai pu par exemple ouvrir des courriers de l’école pour les falsifier ou faire de fausses signatures sur des documents officiels.
  • Je manipulais la réalité : J’avais 14 ans. J’étais un élève difficile. J’avais fait l’acquisition d’un second carnet de liaison (en prétextant faussement avoir perdu le premier). Je le signais entièrement sans jamais le montrer à mes parents (j’avais créé une signature pour l’occasion). Chaque fois que j’étais en retard, absent ou que j’avais une mauvaise note, une réprimande ou une heure de colle, je l’utilisais. Je conservais le premier carnet pour toute les bonnes nouvelles.
  • J’ai pu me mettre en danger : J’avais 10 ans. J’étais le premier à rentrer à la maison les jours de semaine. J’avais oublié ce matin là mes clés à l’intérieur. J’avais des corvées à faire. Par peur de la correction à recevoir pour cette bêtise, j’ai échafaudé un plan incroyablement compliqué qui m’a mis en danger. J’ai escaladé la façade pour monter sur le toit. J’ai enlevé des tuiles. Je me suis laissé tombé dans le grenier. J’ai sauté dans la maison par la trappe de visite. J’ai pu récupérer mes clés, ouvrir la porte, tout remettre en place et faire mes corvées. J’aurais me tuer ou me faire très mal pour un enjeu qui n’aurait pas dû en valoir la peine.
  • Je me suis uriné dessus à plusieurs reprises : La terreur que m’inspirait mon père me faisait m’uriner dessus dans l’imminence d’une “correction”.

Qu’est-ce qui, en moi, me fait le plus peur à examiner et à montrer ? Qu’adviendrait-il si je le faisais ?

Je ne ressens pas de peur pour examiner les choses en moi. Je crois cependant que le sujet de mon enfance, de ma position d’enfant mal-aimé, de la maltraitance de mes parents sont les choses les plus difficiles à examiner (sans pour autant parler de peur). J’ai remarqué au cours de mon rétablissement le fort déni concernant ces chapitres de ma vie. Cette prise de conscience est lente et douloureuse mais libératrice depuis que je travaille et partage mes étapes. Je ne me châtie plus parce que je serais coupable. J’ai dorénavant pris conscience d’être une victime.

De la même manière, je ne ressens aucune peur à montrer quoi que ce soit de moi. Je le fais pourtant peux ou pas. Je tiens au contraire toujours plutôt habillement mon interlocuteur à bonne distance. J’ai hérité cela de l’enfance ou je n’étais jamais mis en valeur, au contraire. Aujourd’hui montrer quelque chose de moi, et plus particulièrement mes qualités, reste difficile. Il m’est en effet difficile d’imaginer représenter un intérêt pour autrui. J’ai plutôt l’échec comme emblème et le sceau de ceux qui dérange. M’exposer davantage me montrerait sans doute que je n’ai rien à craindre et que cela peut être enrichissant.

A cause de mes peurs, de quelle façon me suis-je leurré ?

La terreur que m’a infligé mon père a conditionné toute ma vie. Cette maltraitance est à l’opposé du modèle éducatif traditionnel. Toutes ces peurs m’ont nécessairement fait me leurrer dans ma compréhension du monde. De plus, la peur m’est une émotion insupportable dont il faut m’échapper coûte que coûte. Dans ces conditions, toutes les stratégies sont envisageable et le plus souvent de manière erratique : déni, fuite, violence…


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